Ce vendredi 9 décembre 2022, par le biais d’un communiqué du ministère des affaires étrangères, la Belgique a fermement condamné le meurtre de civils à Kishishe et Bambo, dans l’est de la République démocratique du Congo, pour lequel les enquêtes préliminaires des Nations Unies ont désigné des éléments du M23 comme responsables. Le Royaume de Belgique a également « appellé le Rwanda à cesser toute assistance au M23 ».
Le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme (BCNUDH) et la Mission des Nations Unies en RDC ont mené une enquête auprès de 52 victimes et témoins directs, et diverses sources des massacres de Kishishe et Bambo. Selon ces enquêtes corroborées par les informations recueillies par l’Agence France Presse (AFP) et Reuters, le 29 novembre 2022, le M23 a été vaincu par les milices citoyennes qui s’étaient organisées pour les combattre et empêcher leur progression vers la grande ville de Masisi. Avant de battre en retraite, le M23 s’en serait pris aux civils de la ville de Kishishe et de Bambo, en signe de colère après leur défaite. Selon les enquêteurs des Nations unies, 102 hommes, 17 femmes et 12 enfants ont été massacrés par balles et armes blanches, 22 femmes et filles ont été violées et 60 autres enlevées.
Les témoignages des survivants de ce massacre décrivent des scènes de massacres et de viols. Ces survivants ont été entassés dans des camps de fortune dans des conditions précaires, comme dans la ville de Kitshanga dans le camp de Mungote et dans la ville de Rwindi. Après avoir parcouru une cinquantaine de kilomètres pour trouver un abri, ils risquent maintenant d’être des victimes indirectes si l’aide humanitaire ne leur parvient pas rapidement.
Cette ferme condamnation de la Belgique intervient quelques jours après la demande des organisations locales de défense des droits de l’homme, ONGDH du Nord-Kivu, au gouvernement congolais et à l’ONU de saisir la Cour pénale internationale (CPI) pour juger les crimes des éléments du M23 de Kishishe, Bambo, mais aussi d’autres localités comme Kisharu, Ruvumu et Kisigari.
La Belgique est le deuxième Etat, après les Etats-Unis a soutenir le discours de Kinshasa consistant à désigner le Rwanda comme le principal soutien du M23. Le Parlement européen avait également souligné ce fait dans une résolution de novembre 2022 comdamnant l’aggréssion du M23. Ce soutient avait également été largement documenté dans un rapport confidentiel du Groupe d’experts sur la RDC rendus au Conseil de sécurité de l’ONU et qui avait fuité dans les médias.
La société civile congolaise et principalement le Docteur Mukwege, Prix Nobel de la paix, demande à ce que ces comdamnations du soutien rwandais au M23 soient suivis d’effet.
« La situation en République démocratique du Congo est tout à fait comparable à ce qui se passe en Ukraine avec la Russie « , a déclaré Mukwege à Reuters dans une interview à Paris lundi.
« Nous ne pouvons pas, d’une part, accuser ou admettre que le Rwanda a attaqué la République démocratique du Congo, en violation du droit international, en violation de la Charte des Nations unies et, d’autre part, continuer à soutenir financièrement le Rwanda «, a-t-il déclaré.
Il a ajouté que la résolution 2641 de l’ONU prévoit des sanctions contre tout État qui soutient les groupes armés en RDC. « Nous demandons que cette résolution soit appliquée «, a-t-il déclaré.
« Nous devons pouvoir demander au Rwanda de cesser de soutenir les terroristes du M23, car ce sont des terroristes, ils tuent, ils violent, ils détruisent des villages. Ils sont soutenus par un Etat membre de l’ONU. Que cet Etat puisse encore être un fournisseur de troupes de l’ONU, c’est totalement incohérent «, a-t-il déclaré.
La Belgique rappelle également dans ce communiqué, que la souveraineté et l’intégrité de la République Démocratique du Congo doivent être respectées. Un discours dans la continuité de celui tenu par le Premier Ministre Alexander De Croo lors de la visite du couple royal belge en République Démocratique du Congo en juin dernier.
Celui-ci avait déclaré : « Chaque pays a le droit de défendre l’intégrité de son territoire. C’est un sujet qu’on connait très bien en Europe aujourd’hui quand on parle de la situation de l’Ukraine, tout le monde dira l’Ukraine a le droit de faire respecter l’intégrité de son territoire. Je ne vois pas comment ça serait différent ici en RDC. Vous avez le droit d’exiger à vos voisins que votre territoire soit respecté. Vous avez le droit de dire à chacun, de demander à chacun de vos voisins de faire les choses qui sont nécessaires pour éviter une situation d’insécurité dans votre pays. C’est des règles de base. Je reste clair, il faut appeler vos voisins à prendre leurs responsabilités. Si vous estimez que c’est nécessaire, la Belgique est prête à jouer un rôle pour que ces responsabilités soient respectées »
Ce discours avait largement contribué au succès du premier voyage du Roi Philippe en République démocratique du Congo. Il a été très bien accueilli par la population congolaise, qui y a vu un soutien clair des autorités belges face à l’agression subie par le Rwanda. Reste à savoir si la Belgique répondra à l’appel des autorités congolaises et du Dr Mukwege consistant à demander des sanctions internationales contre le Rwanda.